Interview de Delphine Lemonnier, créatrice du jeu Frouch ! la Fée
    Interview de Delphine Lemonnier, créatrice du jeu Frouch ! la Fée
    Delphine Lemonnier, créatrice du jeu Frouch ! la Fée, en concours Trophée FLIP Créateurs sur Parthenay

    Pouvez-vous vous présenter brièvement et décrire votre parcours ?

    Delphine Lemonnier : Je suis artiste plasticienne / touche à tout. J’ai fait une partie de mes études à l’école des beaux-arts de Quimper. J’ai co-crée « Papier Bavard », une petite maison d’édition de livres jeunesse (papierbavard.com). Je suis auteur, illustratrice, prof et pas mal d’autres choses du moment que ça concerne la création (latheierequifume.fr).

    Êtes-vous une grande joueuse de jeux de société ?

    DL : Non, malheureusement, j’aimerais avoir plus de temps à consacrer aux jeux. Mais je profite de toutes les occasions entre potes pour tester des nouveautés. Et puis je fais partie d’une association de jeux ce qui “m’oblige” à jouer aux rendez ludiques que nous organisons (grimoires.com)

    Quels sont vos jeux préférés ?

    DL : Les Aventuriers du Rail remporte ma préférence. Ce n’est pas très original, j’en conviens, mais c’est un jeu qui convient à, à peu près, n’importe quel public, et qui procure des sensations de jeu que j’aime. Il y a aussi Claustrophobia avec lequel j’ai beaucoup joué avec mon mari Yohan.

    En coup de cœur récent, il y a Edo, Escape, et Stratopolis.

    Et plein d’autres évidemment.

    E : Êtiez-vous une joueuse régulière avant votre création ?

    DL : Oui, je joue aux jeux de rôle depuis le lycée, c’est à dire le début des années 1990. Et on joue avec Yohan aux jeux de société depuis les vacances de Noël 2001. C’est très précis parce qu’à la faveur d’un problème de voiture, nous sommes restez bloqués quelques jours en Alsace chez des amis qui avaient une ludothèque… A l’époque en France, on ne trouvait pas facilement des jeux mais l’Alsace ce n’est pas loin de l’Allemagne… Ce furent donc les premiers achats, avec les règles en français glissées sous le cello de la boite : Kahuna, Carcassonne et Alhambra.

    Frouch ! la Fée, jeu de société de Delphine Lemonnier,  en concours Trophée FLIP Créateurs sur Parthenay

    Votre jeu « Frouch ! La Fée ! » était au concours Trophée FLIP Créateur en 2009, pouvez-vous nous en dire quelques mots ? Comment avez vécu cette expérience ?

    DL : C’était très enthousiasmant et très stressant à la fois.

    C’était la première fois que je faisais tester mon jeu à autant de personnes en si peu de temps.

    Les joueurs étaient enthousiastes, ça m’a porté jusqu’à la remise des prix.

    Je vous livre Froutch en quelques mots : c’est un jeu coopératif familial dans lequel on aide des petites fées à fuir un dragon. Fou de rage, il crache du feu et embrase des arbres pour bloquer le passage des fées, les fées, quant à elles, se déplacent ou utilisent leurs pouvoirs pour s’échapper.

    Pourquoi avoir choisi le FLIP pour présenter votre création en concours ?

    DL : C’était une sorte d’évidence. Le FLIP jouit d’une aura indéniable, et le concours de créateurs semblait remonter en puissance après une année charnière où les organisateurs du Festival ont aménagé leurs Trophées.

    De cette aventure au FLIP, est-ce que des éléments déclencheurs se sont fait jours pour entrevoir l’édition et la commercialisation de votre jeu ?

    DL : Oui, aussitôt plusieurs éditeurs m’ont approchée avec le projet de peut-être prendre le jeu. Ensuite, entre les promesses enthousiastes et les actes, il y a un monde, bien entendu…

    Comment vous est venue l’idée de votre jeu ? Combien de temps avez-vous mis à le concevoir et quelles étaient vos motivations ?

    DL : J’ai eu envie de créer un jeu autour d’un de mes projet le “livre en boîte” Papier Bavard. L’histoire était celle d’une petite fée et d’un dragon entre lesquels ça ne se passe pas très bien. Je voulais un jeu coopératif ; pour les enfants je pense que c’est un bon moyen d’aborder le jeu de société. Et voilà, je l’ai fait.  Je n’osais pas trop le faire tester au début, mais les premiers retours m’y ont encouragé. J’ai dû travailler et tester ce jeu pendant environ un an avant de le présenter au flip (évidemment pas à temps plein !).

    Quelles ont été les étapes de la création du jeu ?

    DL : Je suis partie d’un passage de l’histoire du conte de la fée Mousse, puis j’ai réfléchi à mes priorités : jeu coopératif, simple, évocateur et immersif.

    La mécanique est venue de l’histoire et des personnages.

    Après il a fallu ajuster et affiner tout ça.

    J’ai repris le travail de création sur ce jeu au début de l’année 2012 après 2 ans d’attente et j’ai pu revoir des idées et affiner encore le jeu !

    C’est un long travail de réglage même pour ce genre de jeu simple.

    Delphine Lemonnier, créatrice du jeu Frouch ! la Fée, en partie test avec des enfants

    Avez-vous fait tester votre jeu à votre famille, par des amis, une association, des spécialistes ?

    DL : Bien sûr ! Ça a commencé par les amis et la famille, puis en association : Grimoires et Créoludo qui m’ont bien aidé au début, puis à des spécialistes : les enfants que j’avais en ateliers d’arts plastiques !

    Toutes ces étapes m’ont permis d’avancer dans la création.

    Et puis le public des salons est très important aussi, c’est un condensé d’informations, pendant les festivals, je prends d’ailleurs toujours des notes sinon, j’oublie des choses.

    Êtes-vous édité, pouvez-vous nous raconter cette aventure ? Aviez-vous tenté votre chance auprès des gros éditeurs ? Vous êtes encore en recherche d’un éditeur, racontez-nous vos recherches, vos choix et les freins que vous avez rencontré ?

    DL : J’ai eu la chance au début de ne même pas avoir à faire de démarches pour pouvoir être édité ! C’était un peu le rêve. Quelques mois après le résultat du FLIP, deux éditeurs me démarchaient. J’ai signé avec Krok Nik Douil, mais ce n’est pas si simple !

    Aujourd’hui, malgré ce que beaucoup de gens croisés sur les salons pensent, le jeu n’est toujours pas édité.

    J’ai récupéré les droits du jeu en décembre dernier, et je cherche de nouveau un éditeur, évidemment le soufflet du FLIP 2009 est un peu retombé depuis et les démarches sont plus laborieuses…

    Avez-vous gagné d’autres prix avec ce jeu ?

    DL : Oui. Je n’ai participé qu’à 3 concours avec ce jeu, la même année que le FLIP et j’ai eu la chance de revenir avec la Grenouille d’OR de Panazol et le Charvin d’or d’Ugine.

    Est-ce que vous avez d’autres projets de jeux en cours ?

    DL : Oulala oui !

    Totoro“, un jeu familial coopératif dans l’univers du dessin animé… Totoro des studios Ghibli. “Le potager” un jeu d’enchères et de bluff méchant comme il faut destiner à un public familial/adulte. “Rat A Trouille”, un jeu méchant de pose de tuiles magnétiques, une sorte de course de rats dans une décharge. “Le chocolat”, un jeu de rapidité gourmand. “Air Music” un jeu de mime et d’ambiance, un jeu de chasse au trésor qui n’a pas encore de nom… et pas mal d’autres à différents stade d’avancement.

    Quels conseils pouvez-vous donner aux personnes qui souhaitent créer des jeux ?

    DL : C’est tentant de donner des conseils évidemment mais je ne suis pas vraiment en position de le faire !

    La seule chose que l’expérience m’a apprise c’est qu’il vaut mieux faire cette activité par passion et plaisir, que dans le but de devenir riche et célèbre (même un petit peu).

    Profiter des bons moments de création, de plaisir de jeu autour d’une table et de rencontre sur les salons et s’il y a plus : le prendre comme un bonus !

    Avez-vous des conseils pour ceux qui créent leur jeu ?

    DL : Ça c’est encore plus dur que de répondre à la question précédente…

    Je ne vais pas donner des conseils mais je peux vous dire ce que j’applique à mes propres créations.

    Je n’essaie pas à tout prix de faire rentrer toutes mes idées dans un seul jeu. Parfois il vaut mieux renoncer à une excellente idée et la garder pour en faire un jeu à part entière.

    Quand je pense avoir fini mon jeu, j’essaie de lui enlever un à un tous les mécanismes et rouages ludiques (thème, personnages, matériel…) pour voir ce qui est indispensable (Ca, c’est grâce à mes copains les Ludonautes !)

    J’écoute tous les retours même si ça fait mal (évidemment je ne garde pas tout ce qu’on me dit !).

    Je crée mes jeux à partir d’un thème la plupart du temps, alors j’essaie de ne pas trahir ce thème au cours des différentes phases de création/destruction du jeu.

    Mais malgré cela, je conçois que dans l’édition, l’on ait parfois besoin de changer la thématique d’un jeu et même si ce n’est pas facile, je le modifie.

    C’est aussi un exercice de style. C’est intéressant de travailler sur commande.

    Pour résumer, je ne reste pas bloquée sur ma création.

    Si mon jeu était parfait, je n’aurais plus aucune raison d’en créer un autre !

    Un dernier mot ou remarque “libre” ?

    DL : Oui, je voulais dire un petit mot en particulier aux créatrices : arrêtez de ne faire que des jeux de lettres et des jeux éducatifs. Nous sommes des joueuses comme les autres, capables de produire de beaux objets ludiques et d’apprécier toutes sortes de jeux. Ma copine Annick Lobet pourra vous en parler aussi bien que moi !

    Merci d’avoir accepté de répondre à nos questions.

    Etienne Delorme – 10 mai 2013

    Pour plus d’information sur l’auteur et sa gamme de jeux de société :